Roman

La Rousse

Par |2016-12-21T15:23:50-05:003 février, 2014|Cours de création littéraire, Dossiers thématiques, Roman, Textes de creation, Tout le monde aime les incipit|

Son cœur bat dans sa queue. Il me serre les hanches. Je m’amuse à faire danser mes cheveux. Ils se répandent partout sur la peau laiteuse de ma conquête. William devient roux à son tour. Des points de rousseurs lui poussent sur les pommettes. Du roux partout. Une orgie de roux dans un appartement en carton.

Le chevreuil

Par |2016-12-21T15:11:33-05:0031 juillet, 2013|Cours de création littéraire, Dossiers thématiques, L'histoire commence. Atelier du roman, Roman, Textes de creation|

Je n’ai pas grand-chose à faire pour l’occuper. Il dort beaucoup, il ne mange pas, il se distrait en reniflant les odeurs de ma chambre et celles qui entrent par la moustiquaire de la fenêtre. Souvent il veut aller vers les odeurs qu’il perçoit. Il ne comprend pas qu’elles puissent être si proches et que, derrière les fenêtres et les murs, on en soit si loin. Je lui montre les dessins de mon carnet et il est flatté de se reconnaître dans mes portraits de lui. Je dois le rassurer quand un camion passe sur la rue Principale et que la maison tremble : il n’est pas habitué à la proximité du son et n’a jamais senti la terre bouger.

L’odeur de la lumière

Par |2016-12-21T15:11:40-05:0010 juillet, 2013|Cours de création littéraire, Dossiers thématiques, L'histoire commence. Atelier du roman, Roman, Textes de creation|

Hors de question que je retourne au chalet à pied. Je vais attendre qu’on vienne me soulever. Je pointe le nez au ciel. Là-haut, on me jure que des boules de gaz brûlent. Mais je ne les ai jamais vues. Voilà le problème avec les étoiles : on ne peut pas les toucher. Il faut donc que je tienne pour acquis qu’elles sont là. Alors peut-être qu’on me ment? Ce serait parfait, maintenant qu’il est trop tard.

Borealium Tremens

Par |2016-12-21T15:11:49-05:0026 juin, 2013|Cours de création littéraire, Dossiers thématiques, L'histoire commence. Atelier du roman, Roman, Textes de creation|

Je pose mon crayon sur la pile de papier, je rallume ma pipe pour m'aider à réfléchir. Par la fenêtre se dressent les montagnes du Nord, solides et fières. Je m'apprête à décrire mon frère dans ce journal, pour mon roman. De fait, ce ne sera plus mon frère, mais une création de mon esprit, une représentation, une fiction. Il pourrait devenir n'importe qui ou n'importe quoi. Ou simplement ne plus être l’ostie d'alcoolique déraciné qu'il est devenu, condamné à boire jusqu'à la fin, qui arrivera plus vite comme ça, je suppose. C'est bien ce qu'il doit penser aussi, avec raison. Mais quoi? C'est mon frère, mon sang, malgré tout. On est nés de la même terre peu fertile, où quelques graines seulement peuvent croître : l'alcoolisme, la honte, la violence, la haine, la démence.

D’automnes

Par |2016-12-21T15:11:56-05:0010 juin, 2013|Cours de création littéraire, Dossiers thématiques, L'histoire commence. Atelier du roman, Roman, Textes de creation|

Tout devient tangible. Je palpe mon estomac, mon intestin glisse entre mes doigts, je serre mes viscères, ma trachée s’ouvre et laisse sortir mon cœur. Je m’invente, me réinvente et m’autosuffit. Je pourrais passer des heures comme ça, sans manger et sans boire. Juste à inventer de nouvelles couleurs à la saison triste

Feu ma mère, feu mon père

Par |2016-12-21T15:12:04-05:0013 mai, 2013|Cours de création littéraire, Dossiers thématiques, L'histoire commence. Atelier du roman, Roman, Textes de creation|

— Cinquante litres en descendant. Si les chauffeurs veulent plus, tu leur vends les bidons. S’ils veulent moins, tu fais payer cash. T’acceptes pas les chèques, tu prends juste le cash. J’me suis fait arnaquer à courir après des salauds de voleurs. Tu prends le cash. Tu restes alerte, tu lis rien d’autre que le journal. Mais quand tu lis, tu regardes le poste après chaque ligne. Pas question de finir une page sans lever les yeux. Pour que l’eau coule sans rouille, tu laisses le robinet ouvert une à deux minutes chaque matin. La machine à café, c’est gratuit pour toi, mais t’abuses pas. Une tasse le matin, une le soir si tu veux. Pas plus. Si jamais t’as faim, que t’as oublié ton lunch, tu peux prendre quelque chose dans les rayons. Tu me l’écris dans le cahier noir en dessous de la caisse. Tu l’remets là après. Tu marques tes heures dedans aussi. Pour l’uniforme, je t’en prête trois. J’avais pas ta grandeur. J’aurais fait raccourcir les manches par ma femme, mais…

La mort du destin

Par |2016-12-21T15:12:13-05:001 mai, 2013|Cours de création littéraire, Dossiers thématiques, L'histoire commence. Atelier du roman, Roman, Textes de creation|

Je me nomme Hugo-Guy Godbout, j’ai vingt-sept ans et je suis maintenant sans emploi. Je sais, mon nom est affreux. J’ai d’ailleurs l’intention de le changer très bientôt. Mon histoire était tout ce qu’il y a de plus ordinaire avant que je me fasse renvoyer des archives de la bibliothèque municipale. Mais ce matin-là, j’avais certainement vécu l’un des pires réveils de ma vie. Il est vrai que j’avais passé la nuit sans me faire réveiller, mais en ouvrant les yeux, je n’avais qu’une idée en tête : balancer mon radio-réveil au bout de la pièce. Il faut dire qu’il m’avait tiré du sommeil en faussant une chanson de Céline sur la chaîne Rouge-wannabe-radio-branchée. Depuis deux jours, tout semblait m’empêcher d’arriver à l’heure au boulot, mais je n’avais jamais eu autant de retard que ce matin-là. En m’assoyant sur le bord de mon lit, j’ai senti une légère humidité à mes pieds. En fait, j’avais les deux pieds dans l’eau; le réservoir à eau chaude s’était vidé durant la nuit. Il va de soi que j’ai tenté d’appeler au travail pour avertir la secrétaire de mon retard, mais comme les deux derniers jours, les boutons du téléphone ne fonctionnaient pas...

L’Arbre, ou comment ils apprirent à se faire confiance

Par |2016-12-21T15:12:22-05:0029 avril, 2013|Cours de création littéraire, Dossiers thématiques, L'histoire commence. Atelier du roman, Roman, Textes de creation|

Le peintre l’aperçoit finalement lorsqu’elle est à quelques centimètres du tableau. Seulement, il ne réagit pas. Sur la toile, un arbre au milieu d’un ciel bleu, sans nuage. Les yeux de la vieille dame s’élevèrent tranquillement, comme hypnotisés par la peinture, pour allez se poser sur l’Arbre. Il bouge. Pas un mouvement créé par le vent. Le mouvement d’un animal pris au piège, qui tente de s’en sortir. L’Arbre tente de quitter sa cage de terre. Il veut partir. Sans même retourner payer son café, elle se hâte vers le manoir. Le garçon, avec la tasse dans ses mains, reste là, perplexe. Il a tout vu.