Nouvelles

La biche et le barbare

Par |2016-12-21T15:04:10-05:0020 août, 2014|Conte, Cours de création littéraire, Dossiers thématiques, Écrire en réécrivant, Nouvelles, Textes de création|

Une fois bien en sécurité dans ma chambre à l’étage supérieur, je m’étais mis à guetter un quelconque signe d’activité, mes yeux fixés sur les bosquets, là où « la chose » m’était apparue. Une fois la lune entièrement levée, ce que j’avais cru illusion s’était avéré réalité : il ne s’agissait pas d’une bête, mais bien plutôt d’une femme.

La nuit

Par |2016-12-21T15:04:19-05:006 août, 2014|Cours de création littéraire, Dossiers thématiques, Écrire en réécrivant, Nouvelles, Textes de création, Théâtre|

LE JUGE : [...] Elle comprenait pas la gravité de la situation. She even asked : « Pour que-c’é faire qu’est drette pis pâle de même? » Ha! Ha! Anyway, il y a eu un silence. Then, suddenly, she got it : « Ça s’peut-tu? Ma ‘tite fille à moé? Tellement belle hier encore, ast’heure raide pis frette comme de l’acier? » Poor woman! Elle a glissé à terre, a tendu les mains et a pleuré. So ridiculous! J’aurais vraiment aimé que t’entendes ses sanglots! Pathetic, believe me! We laughed so much! Ha! Ha! Ha!

Le plagiat

Par |2016-12-21T15:04:27-05:009 juillet, 2014|Cours de création littéraire, Dossiers thématiques, Écrire en réécrivant, Nouvelles, Textes de création|

L’abbé Limat utilisait cette phrase secrète pour identifier sans se compromettre les étudiants du coin qui cherchaient à se procurer une ration de drogues miracles. Ces petites pilules vertes, dont l’abbé seul avait le secret, décuplaient les facultés mentales. Tenant le tuyau d’un ami (qui le tenait d’un ami), je désirais faire moi-même l’expérience de leur efficacité. Mais l’ami Limat distribuait ses hosties magiques avec parcimonie, car il tenait à garder un certain contrôle sur son petit commerce lucratif.

Forteresse intercalaire

Par |2014-05-22T10:34:22-05:0022 mai, 2014|Nouvelles, Textes de création|

La Francoforte se ferait demander de parler à la France, ou encore pire, à la Paris, de camoufler son accent, ce défaut qu’il ne faut pas montrer; carence de continent. Patiente, elle répéterait : « Maintenant, la classe, répétez : un crayon. — Un crayon — Dans ma trousse, j’ai un crayon. — Un crayon. » Elle baisserait les yeux sur son coffre à crayons creux et futile. Un crayon à mine puéril dans sa main attendrait sa reconnaissance, en vain. Et la professeure de français britannique se tournerait vers elle, verte, orange et blanche de colère, pour lui signifier à voix forte qu’elle ne prononcerait pas correctement, qu’il faut articuler « un » selon cette norme, celle-là, pas, surtout pas, l’écorchement nasal et démodé de ce pays qui n’en est pas un. Où est-ce déjà? Me le montrerais-tu sur une map?

Dépassement de soi

Par |2014-04-02T08:03:03-05:002 avril, 2014|Nouvelles, Textes de création|

Moi, je ne voyais que le rose de ses gencives et je trouvais qu’il allait toujours aussi bien avec le blanc légèrement translucide de ses incisives; je ne pouvais détacher mes yeux de ses mains. Je ne pensais plus qu’à ses jambes, à son corps de ballerine, à son souffle mesuré et au glissement de ses pieds nus quand elle dansait sur la musique d’un piano. Je pensais à tous ces moments où on ne disait rien, où on ne bougeait pas, assis au bord du fleuve, au bord de la rivière, au bord du lit, au bord de la perfection; ces moments pendant lesquels on ne s’ennuyait jamais sur notre planète pour deux et qui rendaient les problèmes du quotidien si secondaires.

Être le frère

Par |2014-03-19T09:00:08-05:0018 mars, 2014|Nouvelles, Textes de création|

Les troncs au loin se perdent dans une noirceur verte. Chante, la guerre, chante. Parfois, les ombres se bousculent, mais je n’ai pas le temps de viser. Nous jouions souvent aux Cowboys. Si je n’étais pas l’Indien, je pleurais. Je voulais être en pagne. Torse nu. Et te sauter dessus. Te chatouiller, parfois trop. Quatre ans avant que tu arrêtes de rire.

Tomber presque en s’envolant

Par |2014-03-06T08:50:18-05:006 mars, 2014|Nouvelles, Textes de création|

Il lève les yeux, un oiseau passe. Pris d’un vertige, il titube, mais garde les yeux accrochés au grand héron qui étire son vol vers l’horizon. L’espace d’un instant, il en oublie sa destination, le froid sur son visage, le poids sur ses épaules. L’homme a découvert un trou dans les nuages, entre le clocher de l’église et la tour à bureaux.

Rmilat/Las Cuevas

Par |2014-02-03T14:49:43-05:0029 janvier, 2014|Nouvelles, Performance, Récit, Textes de création, Vidéo d'art|

L’après-midi a glissé sur nous sans ennui. L’oisiveté, dans ces conditions, relève de la méditation. Être là. Présent. Surtout ne rien faire. Laisser le temps passer, et nous transporter de l’autre côté, vers l’inconnu. Exister pleinement par le simple fait de se trouver quelque part, à un moment précis, et savoir que l’on s’y accomplit. Ressentir son corps non plus comme un instrument. Le rivage nous transforme.

Gnoséologie

Par |2014-01-12T14:24:45-05:0013 janvier, 2014|Nouvelles, Textes de création|

Ses pieds ne lui permettent pas d’aller très loin dans la neige épaisse. Lorsque janvier amène des bordées aussi hautes que sa canne, elle se fait une tasse de thé brûlant, hume la bergamote en rêvant aux rives de la Calabre et prie pour que l’hiver se tienne tranquille, pour que ses réserves de patates et de sarrasin tiennent le coup et que, avec de la chance, le lynx se pointe avec son museau enneigé et un lièvre tiède dans la gueule. Mais comme elle n’a personne à qui prier, ses derniers espoirs s’empêtrent dans les épines encore vertes des pins. Et cette année, l’hiver est long.