Nouvelles

Les Bêtes de Quersagne

Par |2016-12-21T14:59:53-05:0010 avril, 2015|Concours, Concours : Faites court!, Dossiers thématiques, Nouvelles, Textes de création|

Un mur de pierres la brisa dans un sifflement aigu, et elle s’écrasa contre une vitre trop fine et trop ancienne qui se fissura. Il apparut alors sur la vitre de la cellule de l’abbé Brumause une étoile argentée et tranchante, alignée avec celle du Berger dans le ciel. L’abbé Brumause dormait profondément, son grand corps lourdement allongé sur le matelas et recouvert de draps pourpres, comme une statue funèbre. Cette nuit-là, il soufflait paisiblement dans sa barbe brune. Il ne rêvait pas : il dormait du sommeil opaque qui fait les grandes nuits, celles qui rendent uniques le jour suivant.

La fuite du père

Par |2016-12-21T15:00:02-05:0010 avril, 2015|Concours, Concours : Faites court!, Dossiers thématiques, Nouvelles, Textes de création|

Sournoisement d’abord, nos conversations s’espaçaient, puis nous avons cessé de reconnaître l’existence de l’autre. Le manque de sexe lui a tiré les traits vers le bas, comme si son pénis triste aspirait tout son corps vers le centre. Ses sourcils ébouriffés ont pris un air sévère, sa bouche pâteuse a fini par se putréfier de l’intérieur et sa peau ne savait plus si elle avait trop ou pas assez de sébum. Son mauvais caractère a pris de l’ampleur et ma voix en a perdu. La fin s’imposait, sans que nous ne sachions comment la concrétiser, sans même songer à se l’annoncer.

La métamorphose du ruisseau

Par |2016-12-21T15:00:19-05:0010 avril, 2015|Concours, Concours : Faites court!, Dossiers thématiques, Lettres, Nouvelles, Textes de création|

Mais la vie étant pleine de surprises, et de désillusions aussi, votre amourette d'enfant n'aura pas duré toute la vie. Jeanne Moreau te dirait « Vous vous êtes connus, vous vous êtes reconnus, vous vous êtes perdus d'vue, vous vous êtes r'perdus d'vue, vous vous êtes retrouvés, vous vous êtes réchauffés, puis vous vous êtes séparés. Chacun pour soi est reparti, dans l'tourbillon d'la vie. » Mais dans ce tourbillon de la vie, elle demeurera à jamais l'amour de ton enfance, le premier, le plus naïf et le plus entier.

Tourbillons de pierre

Par |2016-12-21T15:00:36-05:0010 avril, 2015|Concours, Concours : Faites court!, Dossiers thématiques, Nouvelles, Textes de création|

C’est toi qui blesses ton fils, toi parce que tu es pauvre, toi parce que tu es Noir, toi parce que tu es lâche. À chaque refus, tu as baissé la tête et tu es parti parce que les Noirs, ça ne s’endette pas pour aller à l’université. Tu ne pourras jamais me payer, t’a dit l’un des prêteurs, qui va se faire soigner par un médecin noir? Deux larmes te montent aux yeux. Tu les chasses avec ton poing. Tu retournes à la cuisine et tu attrapes un couteau.

À paume ouverte

Par |2016-12-21T15:00:58-05:0010 avril, 2015|Concours, Concours : Faites court!, Dossiers thématiques, Nouvelles, Textes de création|

Je vais te raconter une histoire, c’est l’histoire de moi qui te perce et qui t’aime, c’est l’histoire de toi qui laisses tout fuir et qui m’aimes, peut-être, un peu, si j’ai de la chance et que je ne te tue pas trop mal, c’est l’histoire d’un poème qu’on désécrit, en te faisant saigner sur les lettres. Immobiles, sans griffes, sans poings, ses mains à elle n’étaient pas effrayantes. Elles mourraient gentiment.

Sur la route de Quito

Par |2015-03-30T14:21:01-05:0030 mars, 2015|Nouvelles, Récit, Textes de création|

Mes genoux tremblent, mon cœur danse el sanjuanito. Je ne veux pas y aller, mais Luis prend ma main moite, et je titube avec lui vers la vieille sécheuse éventrée. Mon pied se prend dans un filet de pêche, je trébuche et me cogne le menton sur le dos de Luis. Immobile, il pointe le sol de son index.

Sorry

Par |2015-02-05T18:20:39-05:004 février, 2015|Nouvelles, Récit, Textes de création|

Je me souviens avoir été surprise du bruit que tu faisais. Tu gémissais comme le vent qui s’écorche entre deux portes de grange, les journées de grand froid. Ton souffle avait le rythme des ailes de corneilles qui battent l’air. Les larmes coulaient jusque sur ton torse. Je t’ai observé et je n’ai rien fait d’autre. J’ai laissé toute la laideur du monde t’infester, et je comprenais que tu ne cherchais pas à l’éviter. Tu as pleuré jusqu’à ce que ton corps se recroqueville. Ta joue était posée sur le fond d’aluminium de l’embarcation et ta peine était devenue silencieuse. Grande écrevisse rouge, ta bouche était ouverte; tes yeux, fermés serré.

La pêche à la mouche en Amérique

Par |2015-01-23T10:41:18-05:0021 janvier, 2015|Nouvelles, Récit, Textes de création|

Nous avions aperçu le Pisces amica dans une émission du National Geographic, sur les ondes de Radio-Québec. Ce poisson, précisait la voix sans visage, évoluait en eaux troubles, ce qui lui procurait force et combativité. Mais sa plus impressionnante particularité venait de ce qu’il fût doté de deux têtes pourvues d’un seul corps. Advenant le cas où il s’en faisait gober une, il continuait à vivre, une tête en moins, tout simplement.

Blood pis gold

Par |2014-11-25T22:18:21-05:0010 décembre, 2014|Conte, Nouvelles, Récit, Textes de création, Théâtre|

Michel pis moi, on… on l’a acheté y’a cinq ans, en arrivant de Sainte-Anne. Dans c’temps-là, c’était pas ben ben populaire. Nous, on en a fait une beauté. Top notch. Avec des tapis en minou pis des écrans partout pis des lumières LED dans des aquariums derniers cris pis des caméras dans chaque chambre.