Dans une entrevue accordée à Richard Giguère et Robert Yergeau et publiée dans le trentième numéro de la revue Lettres québécoises, paru à l’été 1983, Michel Beaulieu affirme que « l’écriture doit être impudique ». Voilà ce qui m’intéresse dans le processus de création littéraire : l’impudeur la plus totale, l’intimité la plus crue, quitte à ce que ce soit déstabilisant pour le lecteur, quitte à me mettre en danger en tant qu’auteur et en tant qu’individu. Car l’écriture, rappelons-le, est le lieu de tous les possibles, mais aussi de tous les dangers. Et c’est précisément ce que je veux explorer par le biais de l’écriture : les dangers du dévoilement, de l’aveu et de l’authenticité ainsi que les possibilités et variations multiples, voire infinies, de l’intime. Sans oublier les souvenirs et les réminiscences, qui m’obsèdent ces derniers temps : il me tarde d’expliquer ce que je suis maintenant devenu en opérant un retour sur mon passé, en interrogeant mes origines, en tentant de reconstituer exactement, grâce à l’écriture, ce que furent mon enfance et mon adolescence, même si les souvenirs sont par essence fugaces; même si, en se penchant sur son passé, on finit toujours par changer tel ou tel détail, modifier tel ou tel souvenir et, ultimement, trahir ce que l’on est.
Dans le cadre de ma résidence d’écriture pour Le Crachoir de Flaubert, j’explorerai ces thématiques par le biais de quelques fragments narratifs qui constitueront le cœur d’un projet plus vaste : un roman dans lequel je reviendrai sur mon adolescence et sur mes années d’étude à la Polyvalente des Abénaquis, en Beauce, où j’ai complété mon secondaire. Il s’agira ni plus ni moins d’un « bottin des finissants » dans lequel je m’adresserai directement à toutes les personnes que j’ai côtoyées de près ou de loin dans cette institution.