Prise dans le contexte d’un récit de pèlerinage, cette question se complexifie encore davantage. L’écriture et la marche, désormais placées côte à côte, deviennent conditions l’une de l’autre. Dans sa position d’écrivain-pèlerin, l’auteur ne peut mener à bien son travail qu’à partir du moment où chacune des activités trouve son accomplissement. Or, il m’apparaît souvent que malgré la nécessité qui les lie, ces deux activités entrent aussi souvent en contradiction. Une nouvelle question s’ajoute à l’équation : est-on pèlerin si on ne marche pas?
En chemin sur les routes du pèlerinage, l’écrivain-pèlerin n’a d’autre choix que de diviser son temps. Il y a, d’une part, le temps de la marche et, d’autre part, le temps de l’arrêt. Si l’activité principale du pèlerinage (soit le cheminement le long des routes balisées) s’effectue durant la marche, l’écriture, elle, s’accomplit essentiellement dans l’arrêt. Et cette division du temps, malgré tous les idéaux d’écriture que l’on peut porter dans l’immobilité du corps, ne s’efface pas si aisément lorsque celui-ci se met en mouvement. Dans la réalité physique, la marche et l’écriture se ressentent le plus souvent comme deux activités distinctes en alternance l’une de l’autre, plutôt qu’en symbiose. Ce qu’il faut pour les réunir est une véritable transcendance.
En octobre 2013, je suis parti carnet à la main vers le Japon avec en tête l’idée d’écrire un texte qui soit le reflet le plus fidèle possible de mes aventures. J’avais prévu passer une semaine ou deux à Tōkyō avant de me rendre sur l’île de Shikoku et de commencer mon pèlerinage. Quatre jours dans la métropole furent plus que suffisants pour bouleverser mes plans. Le sentiment de solitude, l’incapacité à communiquer et les regards désapprobateurs que mon comportement (innocent, mais hors-norme) suscitait m’ont énormément angoissé. Lorsqu’un homme s’est écrasé à mes pieds après s’être jeté du haut d’un immeuble du centre-ville, j’ai, en un sens, perdu la raison. Le plan que je m’étais minutieusement tracé depuis les salles de cours universitaires s’est violemment tordu et mon esprit déséquilibré n’arrivait plus à suivre les balises que je m’étais fixées. J’ai beaucoup écrit à Tōkyō. J’ai écrit pour essayer de comprendre cette angoisse qui me saisissait durant le voyage et, plus tard, pour essayer de nettoyer l’horreur étouffante du centre-ville. Je balayais de réflexions les pages de mon carnet comme les policiers balayaient d’eau les trottoirs ensanglantés sans pour autant trouver la paix. Plus j’écrivais et plus ma pensée s’embrouillait. Chaque phrase soulevait de nouveaux questionnements qui eux-mêmes généraient plus d’angoisse qu’ils n’en guérissaient. Ma réflexion s’est emmêlée au point où j’ai finalement cru bon de quitter Tōkyō, de fuir cette masse illisible pour rejoindre au plus vite la quiétude de la campagne japonaise. Je laissai derrière moi la ville et, avec elle, mes pensées ouvertes comme des gouffres. Mon écriture, à partir de ce moment, s’est mise à suivre des chemins imprévus.
Dès mon arrivée sur Shikoku, je remarquai que mon carnet se remplissait naturellement du récit de chaque jour, de la description presque détachée de mon parcours dans l’espace. Mon écriture semblait ne plus s’intéresser à mes pensées, mais plutôt s’être tournée vers ce qui se passait autour de moi. Ce n’était pas tant ma pensée qui était en dormance, c’était simplement que les mots ne s’intéressaient plus à elle. L’angoisse non plus n’était pas disparue. Seulement, en portant mon attention sur la marche et ses moments d’arrêt, sur la cadence particulière du pèlerinage, elle m’apparaissait d’une manière différente. À l’étape du soir, ou parfois aux abords de la route sous le soleil de midi, dans ces moments où je m’abandonnais à ne rien faire, je ressentais un vide qui me venait de je ne sais où. Du monde, peut-être. Son origine était nébuleuse, mais sa présence ne faisait aucun doute. Il m’arrivait souvent de le sentir entre deux paysages, entre le texte qui s’écrivait le soir dans la pénombre de la chambre et moi, entre le bouddha figé dans sa pause méditative sur l’autel et mes prières. Il me semblait aussi que c’était le même vide qui se dressait entre ma vie à Montréal et celle des millions d’autres personnes qui participent à maintenir ensemble les morceaux de notre société. Il y avait un vide dans ce que je vivais qui semblait lier entre elles les choses que je percevais. Ce n’était pas en soi quelque chose que j’arrivais à observer consciemment, mais plutôt un trou qui existait entre les instants de ma conscience. Un vide qui ne se livrait jamais directement à ma perception, mais qui semblait tout de même révélé par elle.
Parler du vide est délicat, car il s’agit d’une chose dont je n’ai jamais pleinement conscience. C’est seulement à travers l’interruption des moments de ma conscience (ce dont j’ai effectivement conscience) ainsi qu’à travers le sentiment que cette interruption m’apporte que je devine son existence. Et c’est peut-être là une conséquence des limites de ma perception. Car il ne m’est donné de percevoir qu’en une certaine mesure, un intervalle restreint à l’intérieur duquel peut s’étendre sans vertige ma pensée. Je ne peux concevoir le monde autrement qu’en me rapportant à quelque chose d’assez petit pour oublier un instant l’infini dont je fais partie et que mon intellect n’arrive pas à saisir. Le temps se divise en secondes, en minutes et en heures. L’espace en distances, en surfaces et en volumes. Ce sont là certaines séparations que j’ai longtemps considérées essentielles, car elles apaisent le vertige causé par l’immensité de l’ensemble. Le réflexe de ma pensée est de fragmenter le monde pour mieux le comprendre, pour mieux le réfléchir. Mais en elle‑même, cette fragmentation crée des limites entre lesquelles se trouvent des espaces sans fin. Entre les mesures, entre les fragments, il y a tout ce vide qu’il me faut bien essayer de combler d’une manière ou d’une autre. Les rituels, comme les mathématiques ou la poésie, me servent (comme ils servent à d’autres) à combler les vides. Mais parfois, lorsque le mot est juste, que l’équation prend un sens nouveau ou que les prières montent, je sens ma perception s’élargir et alors, ce qui n’était plus qu’une mascarade apaisante devient une véritable sensibilité au vide et au plein, à ce qui forme le réel.
Marcher était rempli de vide. Je le ressentais comme je ressentais la solitude ou le silence. Éprouver le mouvement comme phénomène continu n’était pas chose facile. En marchant, je comptais les kilomètres, calculais les heures, additionnais les jours et pensais aux étapes suivantes. Ma perception du mouvement restait la perception d’un déplacement dans le temps et dans l’espace (un objet qui se trouve en un endroit se trouve en un autre l’instant d’après). Ce qui ressemblait à un moment de réel (un intervalle continu) était constitué de fragments troués, d’interstices et de mesures. C’était la jonction de plusieurs mesures statiques (telle distance, tel instant, telle position, etc.) en une mesure, disons, plus dynamique. Contrairement aux mesures statiques, la mesure du mouvement me demandait de faire appel à mon imagination. Joindre les instants pour arriver à concevoir le mouvement relevait de ma capacité à imaginer. Cette différence dans la mesure était cruciale puisqu’elle ouvrait sur un vaste champ de possibilités, un espace pour le moins insoupçonné. Utilisée avec un peu d’aplomb, l’imagination me permettait d’entrevoir dans ces déplacements davantage qu’une simple succession de mesures. Elle me permettait de sentir le vide en prenant conscience du plein, ce qui, a priori, peut paraître paradoxal, et que je tenterai d’expliquer ici.
Cinq siècles avant notre ère, Zénon d’Élée (dont la pensée fut rapportée dans la Physique d’Aristote) illustra le paradoxe du mouvement. Il expliqua qu’un mobile se trouvant en un point A (disons l’extrémité d’une table) ne pourra jamais atteindre un point B (disons l’autre extrémité de la table) puisqu’avant d’y arriver, il devra d’abord franchir la moitié de la distance qui sépare les deux points, et qu’une fois cette longueur parcourue, il devra encore franchir la moitié de la distance restante, puis encore la moitié de ce qu’il reste, sans jamais pouvoir atteindre son objectif puisque l’étendue qui le sépare du point B reste divisible à l’infini. Or, dans la réalité et malgré la logique de cette explication, le mobile atteindra bel et bien le point B. C’est ce qu’on nomme aujourd’hui le « paradoxe de Zénon ».
La perception seule ne me permet pas d’imaginer qu’il puisse y avoir une distance infinie entre A et B. Il me faut une ouverture pour pouvoir l’imaginer, une faille dans la mesure que seule la mise en forme (ici dans un langage mathématique) permet de dévoiler. Ce qui se trouve au-delà de cette brèche est peut-être impossible à saisir complètement, car il s’agit, me semble-t-il, d’un espace infiniment plus vaste que celui observé par la perception et contenu par la mesure. Mais si je ne peux le comprendre ou le concevoir, si cet infini derrière l’ouverture reste inaccessible aux chemins de ma pensée, mon intuition me pousse à croire qu’il est tout de même possible de l’atteindre par un quelconque détour de l’esprit ((Le paradoxe de Zénon supporte plus d’une interprétation. Il se résout, par exemple, si l’on suppose l’existence d’une unité spatiale indivisible. Son usage dans l’essai reste illustratif des intuitions du pèlerin-écrivain.)).
J’avais (et j’ai toujours) cette intuition en marchant que le déplacement physique, celui que je percevais et que je mesurais, n’était qu’une mise en forme d’un mouvement beaucoup plus important, un mouvement infini et continu qui ne s’arrêtait pas à l’étape du soir, mais qui se poursuivait au-delà même de l’immobilité du corps. Assis sur le tatami de ma chambre, je planifiais ma journée du lendemain en additionnant minutieusement les kilomètres de chaque portion de route. L’inactivité du corps entraînait l’action de la pensée qui, inévitablement, mesurait. Dans ma perception, l’immobilité était absente de mouvement. Elle était un moment de vide, un laps de temps durant lequel le corps n’avançait pas. Or, si le corps n’avançait pas, si les kilomètres cessaient de s’additionner un instant, cela ne signifiait pas nécessairement l’arrêt du mouvement. Ou du moins, cela ne signifiait pas son absence. Cette perception était le résultat d’une pensée qui réduisait l’ensemble du pèlerinage à son seul trajet. La mesure du chemin était une mise en forme qui ne tenait pas compte de sa dimension intérieure, de l’infini qui se cachait dans le déplacement du mobile. Mais il arrivait parfois, au détour d’un sentier de montagne, que se présentait une ouverture, une brèche qui révélait un espace cent fois plus vaste que cette portion de paysage, que ce fragment d’autoroute; un espace incommensurable dans lequel le corps, comme imaginé dans le paradoxe de Zénon, ne s’arrêtait jamais. Autrement dit, mon intuition me laissait croire que j’avais une perception trouée du mouvement et que dans les interstices de ce mouvement mesuré se cachait une véritable plénitude, inhérente au monde, mais qui restait voilée par ma perception.
J’écrivais rarement durant le jour. Je prenais régulièrement des notes à l’occasion d’une halte ou d’un moment d’arrêt, bien sûr, mais il n’en restait pas moins que la plus importante partie de mon récit s’écrivait le soir dans ma chambre de minshuku, à la lueur de la lampe. C’était après le coucher du soleil, lorsque la pénombre s’installait et avec elle le silence de la nuit, que le climat était le plus propice aux mots. Le calme cédait volontiers la place au grattement de ma plume. Les insectes venaient se coller à la lumière du plafond et, dans les heures les plus tranquilles, parfois, un cafard s’aventurait sur les tatamis. Je levais les yeux, interrompais mon écriture pour observer un instant, puis reprenais mon travail lorsqu’il disparaissait sous un meuble ou par la fenêtre ouverte.
Orhan Pamuk, dans son discours prononcé à l’occasion de sa réception du prix Nobel en 2006, raconte comment, assis dans sa bibliothèque, il finit, à force d’obstination et de patience, par écrire des livres. L’acte essentiel de l’écriture se trouve, selon lui, dans l’homme assis qui, à l’aide des mots, se plonge en lui-même : « L’homme dans sa bibliothèque est le lieu où se fonde la vraie littérature » (Pamuk, 2009 : 254). Dans sa bibliothèque, entouré des mots des autres, il se construit, il bâtit pierre par pierre ce nouveau monde qui l’habite et qu’il habite, « comme on bâtit un pont, une voûte » (Pamuk, 2009 : 521). Si l’on considère la bibliothèque comme le lieu des mots, et l’homme, non seulement comme le bâtisseur de ce lieu, mais également comme le lieu de cette rencontre entre les mots (ou le lieu de ce lieu), c’est dire alors que la littérature relève d’un double espace qui est celui de l’homme et de son langage. C’est peut-être ainsi qu’on peut penser qu’elle se construit comme un pont ou une voûte, à la fois par et à travers l’homme. Le pont se construit à main d’homme au-dessus d’un fleuve ou d’un ravin. Son lieu est celui des berges et des espaces infranchissables. La littérature, comme le pont, est une manière d’occuper ces espaces qui l’appellent, qui l’exigent, et sans lesquels elle ne peut se constituer.
Avant de partir en pèlerinage, je m’entendais souvent dire que j’avais besoin d’être seul pour écrire. Plus je réfléchis à mes paroles, plus je me rends compte qu’elles sont fausses. Ce que je cherchais réellement en attendant le crépuscule silencieux de ma chambre pour sortir mon carnet, c’était une pièce close. Je n’écrivais jamais seul. J’écrivais toujours de ce lieu où je me trouvais entouré des autres, de leurs mots et de leurs échos dans mon esprit. Comme Pamuk dans sa bibliothèque. Emmuré dans une chambre ou dans un espace silencieux, je rejoignais dans un partage au-delà de la pensée rationnelle, la source de ma propre écriture. C’était seulement là que se faisait le véritable dialogue, celui qui n’appartient pas à la communication, mais à la communion, celui qui déborde sur l’écriture. Chacun des mots que j’écrivais était accompagné, même de loin, par ceux des autres. Ils étaient le témoignage de nos retrouvailles. Ce qui s’échangeait dans cet espace ce n’étaient pas des signes et des définitions, c’étaient des élans, des états de l’être que je souhaitais explorer.
Ce qui tombait sur le papier nu au centre de cette pièce était l’accomplissement d’un pèlerinage. Car au fond, l’écrivain n’écrit pas entouré de vide, pas plus que le pèlerin ne déambule dans la solitude spirituelle la plus complète. Tous deux rejoignent, dans leur démarche, le monde qui les a vus naître. L’écrivain, qu’il le veuille ou non, fait de la littérature. Dans son travail, il entre en résonnance avec ses pairs, avec les mots qui ont, un jour ou l’autre, atteint et bouleversé son esprit. Dans un mot, c’est toute la littérature qui est exprimée. Devant ma page ou devant l’autel d’un temple, lorsque ma conscience était tout entière absorbée par mon travail, il m’arrivait de me sentir emporté vers le silence. Rejoindre ce lieu de communion, cet espace libéré des limites de la rationalité et de la communication, c’était peut-être ce qu’on appelle transcender.
J’ai découvert au fil de ce voyage que la répétition spécifique d’un geste ou d’une circonstance pouvait faciliter la transcendance. Et c’était certainement là l’essence de ce qu’on nomme rituel. Ce n’était pas par obstination que j’attendais soir après soir ce moment particulier où la solitude me poussait vers l’écriture. Ce n’était pas non plus pour rien que les prières semblaient plus légères lorsqu’elles étaient récitées devant l’autel. Se laver les mains, allumer une bougie, faire brûler l’encens, sonner le gong et s’incliner, chacune de ces actions allégeait et facilitait le mouvement de soi vers le monde. Les rituels, en ordonnant le réel, favorisaient ce passage. Ils étaient, pour peu que j’en aie conscience, les chemins privilégiés de la communion. Je dis qu’il me fallait en avoir conscience, car, sans cette conscience, comment aurais-je pu repérer l’ouverture qui menait à cette vaste étendue au-delà des frontières du soi? Sans la conscience, le rituel devenait un chemin sans issue, une route visitée cent fois de la même manière, une répétition mécanique qui contenait l’esprit dans les limites de la pensée. L’absence de conscience était ce qui vidait de sens le rituel. Le vide, à force d’user le corps et l’esprit, finissait tôt ou tard par se frayer un chemin jusqu’à l’être. C’était peut-être la raison pour laquelle certains Japonais, déjà ensevelis sous le poids de ce vide, tentaient une ultime fuite vers la mort.
Marcher me permettait également de me rendre compte à quel point la douleur pouvait être féconde en rituels. Chaque geste posé pour me soigner finissait, à force de répétition, par prendre l’ampleur sacrée du bonheur. Refaire son bandage à l’étape, vider les ampoules gonflées, faire quelques rotations des épaules pour libérer les articulations, réajuster les courroies de son sac, tout cela rendait compte de cet état qui était le mien, celui d’être pèlerin sur la route. À travers les soins que je me prodiguais, j’obtenais la conscience aiguë d’être sur les chemins. La douleur était le signe du chemin qui m’habitait et me transformait; « [Le Chemin] est une force. Il s’impose, il vous saisit, vous violente et vous façonne. Il ne vous donne pas la parole, mais vous fait taire » (Rufin, 2013 : 23). Alors on se tait et on écoute. On laisse la douleur tracer son chemin en ne faisant rien autre qu’ouvrir sa conscience aux changements qui s’opèrent. La répétition brise ainsi progressivement les frontières fortifiées du soi. Le rituel s’accomplit et le marcheur, peu à peu, se sent devenir pèlerin.
On ne voyage pas pour se garnir d’exotisme et d’anecdotes comme un sapin de Noël, mais pour que la route vous plume, vous rince, vous essore, vous rende comme ces serviettes élimées par les lessives qu’on vous tend avec un éclat de savon dans les bordels. On s’en va loin des alibis ou des malédictions natales, et dans chaque ballot crasseux coltiné dans les salles d’attente archibondées, sur de petits quais de gare atterrants de chaleur et de misère, ce qu’on voit passer c’est son propre cercueil (Bouvier, 1982 : 46-47).
En ville, replié sur moi-même, je fuis le monde pour échapper à cette vision. Je m’enferme entre quatre murs comme un enfant sous les couvertures en priant pour que demain me trouve encore en vie. Et je me réveille chaque matin amer de cette couardise. Finalement las de vivre à reculons, las d’avoir peur, je m’achète un billet pour le front. Je quitte mon repère et pars en voyage comme on part en guerre contre la mort. Le voyage, plutôt que de m’aider à fuir, me pousse vers l’avant dans ce combat perdu d’avance. Il me force à affronter dans le monde ma propre fin. Chaque jour vécu me rapproche d’une mort certaine. Mais c’est en soi une belle défaite, une défaite qui a bien meilleur goût que la fuite. Le voyageur qui voit défiler son cercueil, plutôt que de reculer, s’en va de l’avant avec la certitude enfin d’être sur le chemin.
[heading style= »subheader »]Bibliographie[/heading]
BOUVIER, Nicolas, Le poisson-scorpion, Paris, Gallimard, 1982.
PAMUK, Orhan, « La valise de mon Papa », dans D’autres couleurs, Paris, Gallimard, 2009.
RUFIN, Jean-Christophe, Immortelle randonnée : Compostelle malgré moi, Chamonix, Guérin, 2013.