En tant que citoyenne, je veux bien être forte.
Mais, en tant que femme, je voulais,
jusque là,
être pourchassée comme une proie,
être prise,
possédée… ((Inspiré de souvenirs vagues de propos ayant été attribués à Anaïs Nin. Propos qui m’ont percutée et qui ont fait éclater en moi un tabou. Je ne saurais trouver la source, mais je tenais à donner ici mon inspiration, par honnêteté intellectuelle))
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Christian Quesnel, Portrait de Mélanie, 2013.
Avoir faim…
vouloir
à s’en scarifier la peau
à s’en éroder les nerfs
— jusqu’à ce qu’ils se rompent
tirer
jusqu’à s’exorbiter les yeux
jusqu’à se fendre les genoux
— tibias incendiés
vouloir
jusqu’à devenir fusain
— dessiner le merveilleux
mais… cette faim…
lui souille les mains
lui perce la bouche
la dévore
pendant qu’elle…
— s’emplit de l’absence
la gorge étouffée
à 2 h du matin
ridicule fugitive étranglée
elle se laisse
râper la joue, la trachée
par l’absence sèche
elle l’a fait jouir
mais il n’y était pas
enduire
la réalité
de baume visqueux
éviter
le choc
— s’échapper de soi
errer
faire mentir sa boussole
— parce que
[…]!les intarissables mains
obliques
les retirer
juste
à
temps
puisqu’
il n’y est pas
il
ne
vient
pas
être responsable
— de ses sens
— de cette violence
rien
de plus violent
que le silence
seul
un regard
vide
pêcheresse
sèvres-toi!
— il n’existe pas
mais elle le cherche
en eux
ils s’évanouissent
tous
tout ce qu’elle ne dira jamais
— avec tant de mots
tout ce qu’ils se diront
— avec tant de silence
elle
cherche la sortie — mais
aucune
issue
trop
chercher à la sève
trop
bouillir
et se sucrer le bec
trop
peu et trop
plein à la fois
trop lucide
trop
imaginé
trop
et puis
rien!
que
le
vide
sur le fil en suspend
l’instant
un fil de bois
souple et transi
se faufile et tricote
un tissu de boiseries
cassé
tenu à bout de bras de bois tordu
tissage improbable…
elle s’effrite
— dessous : rien
rien que…
la tiédeur de la nuit qui s’infiltre
le craquement
les pas
la douce odeur âcre
submergée
eau saline
foisonnements
souffle-saccade
entendre, voir, sentir
et
toucher
un peu
junkie
elle crie : RIS! JOUE!
CRÉE! JOUIE!
elle
éclate
de rire
lui fait la guerre
gagne
appâtée
par le fil funambule
elle peint
sur son dos
un tableau
une gondole vénitienne
à contre-jour
pour errer
cette nuit
sur ses canaux
sa soie
légèrement tannée
y passe les doigts
y voit glisser
deux âmes gourmandes
qui se prélassent
sans rien attendre
sans rien vouloir
que le jour qui passe
que la nuit offrande
son dos
une soie
sous ses doigts
elle peint
un tableau
se glisse en lui
ses tendresses vertiges
ses regards dialogues chimériques
ses odeurs caresses mouillées
sa voix frisson
elle se glisse en lui
et
sous son nombril
sucre ses jours
chevauchée burlesque
fouettée au visage
remplie de rivages
avec lui, elle chevauche l’équilibre
et soudain
— arrêter
tout vouloir
— perdre
surtout
ne pas
perdre l’équilibre
délire soupesé
iodé
ne tenir qu’à un fil
faire la moue
rire
et s’en aller
ne pas
ne plus
répondre
plus rien
à donner
— consoler ma faim.
Je te vomis
désolée
le succédané
c’est trop sucré
et ce n’est pas
vrai.