J’écris pour ne plus avoir à te parler. À te comprendre. J’écris contre ton silence. Contre ton absence. Et je bois, en attendant le reste.
[heading style= »subheader »]En attendant le reste[/heading]
Je collectionne
de toutes petites victoires au fond de la gorge
des sourires
des caresses au bas des reins
Rejoindre la faille
vomir mon fiel aux toilettes
Je me débarbouille aux fonds des pichets
me débarbouille de rancœur
de bouillonnement
de déréliction
Sanctuaire de souvenirs en fer blanc
Je perds le nord pour ne pas perdre la face
Je voudrais arrêter d’entendre parler de toi
Je voudrais te déboîter au complet
jeter les morceaux là où on les avait cueillis
mais les jours renaissent et tu restes en moi
avec ton image labourée de meurtrissures
ton silence dans une serviette
tes crachats ravalés sous la couette
Ton visage est une porte verrouillée à clé
clé que tu as avalée avec ta langue
ta langue de bois
J’ai perdu mon chemin pour ces soirées à venir
soirées de silence
impuissantes
pleines de mes simagrées
J’ai perdu la face
le nord
le sud aussi
le désordre des draps les a engloutis
La poussière s’est affalée contre moi
a construit des châteaux inconnus
Je parcours les étapes d’un voyage terminé
depuis trop longtemps
une nuit par-dessus l’autre
l’enfer propulsé au gré du vent
un oasis de jouissance
expulsé par nos bassins
J’ai évité ta maison toutes les nuits
mais j’y reviens toujours
il y a bien quelque chose à chercher à trouver
De la boussole que tu as cassée.
Ne me reste que l’aiguille
qui pique mes doigts
brise mes phalanges
pointe ta fenêtre
refermée
Vouloir tuer tous les bruits
arracher toutes les langues
escalader le mur à ta rencontre
le corps brut
le désœuvrement
les draps comme les vagues d’une tempête
chair blanche sur nuit noire
poils noirs sur jambes blanches
les nœuds de nos membres se cherchent
le souffle
l’odeur
ça sentait la moisissure chez toi
le sexe aussi
le désir
le sperme jaillissant sur les peaux
Ici, ça sent l’iode et l’alcool
l’herbe et la grève
les mains vides
plus de doigts au creux de mes paumes
plus de jeux matinaux
je m’ennuie de l’odeur de moisissure
de l’odeur des joints éteints sur les lèvres
de la sueur sur la peau humide de trop de plaisir
de trop de désir
de trop d’empressement
Je voudrais effacer le temps avec une gomme bleu novembre
Je voudrais effacer l’herbe
le passage des saisons
le lit en pagaille
la barbe sur tes joues
Je voudrais chanter la guerre
la guerre ouverte
la guerre froide
déclarée sans un seul mot
Je voudrais te détester pour t’aimer dans le désordre
J’ai cassé le squelette de nos souvenirs
sucé sa moelle
grugé ses os
ma langue s’en souvient
Je me tricote des jours heureux
un visage de porcelaine
Je recouds ma virginité
Je mijote des sentiments sous vide
assaisonnés d’ennui
de fleurs calcinées
Je résous les énigmes
mais mes solutions sont toujours mauvaises
Et le bruit des vagues
de tes vagues
de celles que tu as fait naitre sur mon corps en extase
le sel
l’iode
le sable
tout coule en sueur sur nos peaux
la mer a effacé la peinture
la laque
tout est crû
nu
c’est une histoire de peaux
qui expulsent l’alcool
la nausée
la laideur des fins de soirée
la chaleur entre mes cuisses
la douleur de mes jambes
de mon sexe
de tes ongles
de l’avenir où tu es absent
où tu es de trop
J’ai peur du temps
des autres
de toi
J’ai peur de mon corps
de mes kilos
de ma rétention d’alcool
Et je collectionne les victoires en attendant le reste
de toutes petites victoires au fond de ma gorge
le cœur sur la corde à linge
mon fiel
expulsé
orgasme solitaire