Ma peau consumée
Révèle mes douleurs
À chaque pas dans l’escalier
Mon corps tendu tapi sous les couvertures
S’isole entre les souvenirs
Mais trop tard, déjà les pas
S’empilent du palier jusqu’à moi
Sa colère
Fracasse le bout de silence qui me restait
Maison de pierre
Étouffe ma voix,
Jamais le père
Qui se raconte avec les poings.
Je m’écaille,
m’écarquille,
Je m’extrapole
et m’entortille
Mon corps accueille mes rancunes.
Au dehors de la chair,
Mes mots-misères tracés
À même le monde
S’abîment sous mes souliers
Je voudrais tant me raconter,
Protéger mon nom allochtone
Comment ça s’écrit, comment ça se dit, comment tu le dis ton nom, toi, l’étrangère ; tu as les cheveux de ton père, et je les touche, et je les fouille, et je t’arrache les entrailles, j’estampe ton identité de mes mains-privilèges, je viens écorcher ton existence de ma langue cannibale. Ton nom m’exaspère, ta présence m’intrigue autant qu’elle m’épouvante ; ta peau me le crie, tu ne viens pas d’ici.
Je viens du ventre de ma mère
Mère-douceur
Son sexe réprimé
À l’agonie
Qui tente en vain d’apaiser
Le mari
Mère-douceur
Aime marcher sous la pluie
Sans le père
Et je la suis,
De la maison jusqu’à pas d’heures
Sous les lampadaires complices
De notre fuite éphémère.
Elle dit
Abreuvons-nous de son absence
Avec elle, je deviens terre humide,
Le ciel enveloppe mes origines
J’existe entre les mots,
Entre les gouttes
Qui s’infiltrent sous le manteau
Je raconte femme,
Chair, tout
Ce qui exergue de ma peau
Minuit borde les trottoirs vidés,
Il fait chaud,
Et bon vivre
En été, quand tout le monde est rentré
Nous marchons dans la ville,
Enfin
La peau frissonnante de liberté