T

u as fait fondre les glaciers que je trouvais beaux et même à 6000 kilomètres j’ai froid et même si je ne suis jamais allée en Islande tu meurs quand même et j’ai maintenant peur d’y aller parce que je ne sais pas si c’est héréditaire, si on peut mourir juste parce qu’on y pense ou qu’on y a déjà pensé ou qu’on a eu les mêmes idées toi et moi.

Peut-être qu’en ayant les mêmes yeux tu m’as transmis une faiblesse et le goût d’aller me perdre deux-trois jours quand ça va pas sauf que toi au lieu de sacrer ton camp t’as lâché pour vrai pis tu nous as laissé tomber toute la gang.

J’aurais préféré que tu sois encore là à Noël pis qu’on aille écouter le curé rire de ses jokes plates mais au lieu de ça je reste là à me demander si on aurait dû t’amener en voyage avec nous pis je t’avoue que je le trouve pas drôle pantoute ton guilt trip.

Finalement c’est vrai que la vie c’était trop pour toi ou c’est peut-être nous qui étions pas assez mais jamais j’aurais cru entendre ces mots-là grand-maman s’est suicidée personne t’a compris à la fête des mères quand t’as dit que t’avais fait le tour pis que t’étais tannée mais si t’avais vu mon frère pleurer en mettant ton urne à côté de celle de grand-papa dans le colombarium t’aurais peut-être décidé de rester encore un peu le temps d’une autre partie de bras de fer que tu gagnerais à plate couture pis on serait pas en train de brailler pendant que la fille joue au piano ceux qui s’en vont ceux qui nous laissent à la chapelle de la maison funéraire où des étrangers nous engluent de leur compassion non sentie.

Sérieux je m’en criss de vos sympathies c’est grand-maman que je veux.