Pour relever ce que j’ai nommé la « figure de l’enfance » dans l’œuvre de Guibert, je me suis penché en particulier sur deux de ses livres, qui m’ont semblé être délaissés par la critique : Vous m’avez fait former des fantômes (1987) et Voyage avec deux enfants (1982). Ce délaissement apparaît d’autant plus significatif que les études guibertiennes sont plutôt volumineuses. Mettre ces deux titres de côté a d’abord été mon premier réflexe également. La perspective d’ouvrir ces livres revenait pour moi à ouvrir une boîte de Pandore, à sortir de l’abstraction un côté sombre de Guibert que je préférais jusque-là ignorer. J’y ai finalement trouvé une écriture absolument fascinante et l’énonciation d’un désir tout à fait complexe qui mérite que l’on s’y arrête.
Voyage avec deux enfants est un journal dans lequel Guibert raconte un voyage effectué avec son ami photographe Bernard Faucon et deux protagonistes appelés simplement « les enfants ». Guibert se prend d’affection pour un de ces « enfants » et quelques scènes érotiques se donnent à lire. Le livre est publié sous la forme d’un journal daté, mais les dates sont disposées dans le désordre. Un récit de voyage prétendu « réel » et un récit de voyage fantasmé s’y trouvent emmêlés. Le « récit de la souffrance » (1982 : 33) et le « récit du plaisir » (1982 : 33), pour reprendre les mots de Guibert. Impossible pour le lecteur de parfaitement les distinguer, car certaines métalepses narratives rendent la chronologie improbable. Il faut être attentif à l’intertexte guibertien pour réaliser que le terme « enfant » est un faux-semblant; une sorte de déguisement appliqué sur un personnage – Vincent – qui réapparaît dans plusieurs autres textes sous sa forme « réelle », soit adolescente puis adulte. Il est tentant de voir dans ce jeu une réponse aux photographies de Faucon prises à cette même époque, où des enfants de cire côtoient dans les mêmes mises en scène de vrais enfants ((Nous retrouvons particulièrement ces mises en scène dans une série de photographies intitulée « Les grandes vacances. 1977-1981 » (Faucon, 1995).)).
« Vous m’avez fait former des fantômes qu’il faudra que je réalise » (1967 : 397); ce sont là les mots que Sade écrit à sa femme, lorsqu’il est en prison, et que Guibert emprunte pour intituler le second texte sur lequel porte mon mémoire. Vous m’avez fait former des fantômes est bien un roman sadien, qui présente une sexualité violente et sordide. Dans la première partie, des personnages mi-hommes mi-ogres volent des enfants à la pouponnière, les enferment dans des sacs, les battent, les violent et les entraînent pour des combats nocturnes et clandestins. Dans la seconde, un personnage du nom de Mickie, apprenti « infantero », s’entraîne pour combattre des enfants dans le cadre de corridas. C’est dans ce roman – que Guibert dit aimer « comme un enfant monstrueux sur lequel les yeux des gens ne veulent s’arrêter » (2001 : 436) – qu’apparaît de la façon la plus crue, et la plus résolument fictive, la figure de l’enfance dans son œuvre. L’enfance y fait figure de véritable obsession, comme en témoigne le discours de Mickie :
Je vois des enfants partout, entremêlés, qui me tombent dessus du ciel, des toits, pour m’assommer, pour m’éblouir; quand il neige ce sont des flocons d’enfant qui se délitent en crissant sur mes joues; quand il tonne ce sont des souffles d’enfant; quand il pleut c’est de leur urine et de leurs larmes qu’ils m’arrosent. Ils sont aussi innombrables que des pucerons, mais plus splendides que des lucioles, ils volent en l’air et ils voltigent sous mes yeux […] (1987 : 116).
[heading style= »subheader »]Un contexte socio-historique particulier[/heading]
Marie Darrieussecq dit de ce livre « terrible, magnifique et insoutenable » que l’« on aurait sans doute du mal à [le] publier aujourd’hui » (2009, en ligne). De même, Lolita de Vladimir Nabokov ou Mort à Venise de Thomas Mann subiraient certainement un accueil différent. Il y avait, particulièrement dans les années soixante-dix, un climat de liberté (populaire et institutionnel) entourant l’érotisation de l’enfance qui apparaît absolument incompréhensible aujourd’hui. On croyait, dans certains milieux, que la pédérastie allait participer au même mouvement de libération sexuelle qui a profité aux revendications féministes et homosexuelles. Ce qui ne s’est (heureusement) pas concrétisé. La très estimée revue Libération publiait même des petites annonces facilitant les rencontres entre adultes et adolescents de 12 à 18 ans ((Pour de plus amples détails, se référer à : Anne-Claude Ambroise-Rendu, « Un siècle de pédophilie dans la presse (1880-2000) : accusations, plaidoirie, condamnation », dans Le temps des médias, no 1, 2003, p. 31-41.)). Elle a été pour cela inculpée d’outrages aux bonnes mœurs et d’incitation à la débauche. C’est donc dire que même si la pédérastie n’était acceptée ni socialement ni légalement, elle était moralement autorisée par d’autres instances en position d’autorité intellectuelle. Les propos de Michel Foucault ont d’ailleurs été utilisés pour légitimer la cause, lui qui dans un entretien radiophonique à France-Culture en 1978 mentionnait entre autres qu’on devrait pouvoir, en Cour, « faire confiance à l’enfant pour dire si oui ou non il a subi une violence » (2005 : 776) lorsque sont portées des accusations criminelles. Foucault rejetait ainsi l’idée d’un âge de consentement déterminé arbitrairement au-dessous duquel la parole de l’enfant n’a pas valeur de preuve ((L’entretien a été tenu alors qu’une Commission de réforme du code pénal en France s’apprêtait à modifier des dispositions légales concernant les « attentats à la pudeur » à l’égard des mineurs de moins de quinze ans, qui jusque-là punissaient plus sévèrement les actes homosexuels qu’hétérosexuels. Foucault a été consulté à titre d’expert. Il a également tenu les propos suivants dans le même entretien radiophonique : « Oui, c’est difficile de fixer des barrières. Une chose est le consentement, une autre est la possibilité pour un enfant d’être cru lorsque, parlant de ses rapports sexuels ou de son affection, de sa tendresse, ou de ses contacts (l’adjectif sexuel est souvent gênant là-dedans, car il ne correspond pas à la réalité), autre chose donc est la capacité que l’on reconnaît à l’enfant d’expliquer ce qu’il en est de ses sentiments, ce qu’il en a été de son aventure, et la crédibilité qu’on lui accorde. Or, quant aux enfants, on leur suppose une sexualité qui ne peut jamais se porter vers un adulte, et d’un. Deuxièmement, on suppose qu’ils ne sont pas capables de dire sur eux-mêmes, d’être suffisamment lucides sur eux-mêmes. Qu’ils n’ont pas suffisamment la capacité d’expression pour expliquer ce qu’il en est. Donc, on ne les croit pas. On les croit non susceptibles de sexualité et on ne les croit pas susceptibles d’en parler. Mais après tout, écouter un enfant, l’entendre parler, l’entendre expliquer quels ont été effectivement ses rapports avec quelqu’un, adulte ou pas, pourvu qu’on écoute avec suffisamment de sympathie, doit pouvoir permettre d’établir à peu près quel a été le régime de violence ou de consentement auquel il a été soumis. Aller supposer que du moment qu’il est un enfant on ne peut pas expliquer ce qu’il en est, que du moment qu’il est un enfant il ne peut pas être consentant: il y là deux abus qui sont intolérables, inacceptables » (2005 [1979] : 775).)). Il voyait sans doute là, comme chez les individus emprisonnés ou psychiatrisés, s’opérer un contrôle institutionnel des corps, un « bio-pouvoir » (Foucault, 1976).
Plus spécifiquement dans la sphère littéraire, le prix Médicis a été remporté en 1973 – grâce à l’influence de Roland Barthes ((L’information provient de Gilles Sebhan, dans son hommage à Duvert (2010 : 75).)) – par Tony Duvert, qui se portait à la défense de la pédophilie dans ses essais et qui signait avec Paysage de fantaisie un texte pornographique influencé par le Nouveau roman. L’auteur était d’ailleurs publié par Jérôme Lindon, chez Minuit, qui à la même époque siégeait à la Commission des publications destinées à la jeunesse ((Pour un compte rendu détaillé et fort pertinent du contexte de diffusion de l’œuvre de Duvert en lien avec Mai 68 et les lois françaises, se référer à : Anne Simonin, « L’écrivain, l’auteur et les mauvaises mœurs », dans Dominique Damamme et coll. [dir.], Mai-Juin 68, Paris, Les éditions de l’Atelier, 2008. p. 410-425.)). Lindon lui confia même la direction de la revue Minuit à sa création en 1972 avant de la laisser à son fils Mathieu Lindon en 1979 ((Manifestement influencé par Duvert, le premier roman de Mathieu Lindon, publié sous le pseudonyme de Pierre-Sébastien Heudaux (P-S Heudaux ; Pseudo), Nos plaisirs, raconte, sous le mode de l’absurde et de la caricature, l’histoire d’une ville, Barbecoul, dont toute l’activité est orientée vers le commerce de Capo, un père qui prostitue ses garçons (Heudaux [Lindon], 1982).)). Même si ses textes étaient considérés comme scandaleux, parfois même interdits de vente aux mineurs, Duvert obtenait des critiques élogieuses des médias littéraires.
Bien qu’il y ait quelque chose à entendre de la parole de Duvert sur le plan du désir et de l’écriture, sa posture est militante : ses textes remettent en question le statut de l’enfant dans la société bourgeoise ((Plus près de nous, au Québec, on pense à certains recueils de poésie de Paul Chamberland dont Le prince de sexamour (1976), qui est par ailleurs parsemé de citations de Tony Duvert.)). Pour appréhender son œuvre, il faut la remettre dans son contexte social et politique. Ce qui n’est pas le cas de Guibert, dont l’œuvre se situe dans un registre complètement différent. Dans son cas, il n’y a pas d’enfant réel; l’enfant du texte est l’objet d’un fantasme purement littéraire, que l’écriture construit et relance sans cesse.
[heading style= »subheader »]Déplier le désir d’enfant[/heading]
C’est d’abord l’ouvrage de Chantal Saint-Jarre, Du sida : l’anticipation de la mort et sa mise en discours (1994), qui m’a inspiré une réflexion sur le statut de l’enfance dans l’œuvre de Guibert. L’auteure, qui a accompagné plusieurs hommes et femmes atteint.e.s du sida dans les années 90, souligne que l’enfance occupe une place centrale dans leur discours. Devant la mort, ces individus voulaient enfanter ou s’occuper d’enfants. Elle remarque que sur le plan symbolique, l’enfance est la perte la plus importante du sidéen. En vieillissant d’un coup, le sidéen perd sa propre enfance, il perd la possibilité d’enfanter et porte en lui un virus qui s’attaque aux signifiants de l’enfantement et de l’hérédité, soit le sang et le sperme. Son système immunitaire étant affaibli, il contracte parfois des maladies d’enfant ((Bien sûr, avec les avancées médicales, le destin des sidéens n’est plus le même aujourd’hui. Saint-Jarre se penche toutefois sur des cas réels et littéraires de l’époque de Guibert.)). C’est comme si tout était en place pour que l’enfance, puisqu’elle manque cruellement sur tous les plans, devienne un objet de désir.
J’ai d’abord été attentif aux manifestations de l’enfance dans les derniers écrits de Guibert, ceux où sa mort réelle est imminente. On peut lire ceci dans son roman posthume Le paradis, alors qu’il se construit une filiation avec Rimbaud, l’enfant poète : « Je suis un enfant. Perdu dans la grande Afrique, sur une pirogue qui dérive » (1992 : 125). « Il ne faut pas que je vive dans un musée de peinture, sinon ce serait mon mausolée. J’ai tapissé de portraits d’enfants les murs de ma chambre, je suis un ogre à ma manière ((La même information se trouve formulée différemment dans son journal intime : « Gilles part consommer des dizaines d’enfants à chaque voyage en Thaïlande; moi j’achète des portraits d’enfants par dizaines, fusain, pastel, crayons Conté, dont je tapisse les murs de ma chambre pour en faire la “chambre des enfants”. Ogre l’un et l’autre à sa façon » (2001 : 541).)) » (1992 : 117) écrit-il dans ce même ouvrage. Visitant son ami Michel (Foucault) sur son lit de mort, Guibert ne trouve rien d’autre pour interagir avec lui que de lui montrer un catalogue de portraits d’enfants (2001 : 332). Ce ne sont là que quelques exemples de moments clefs où la pensée de la mort à venir s’accompagne pour l’auteur de celle de l’enfance, salvatrice. Si le sida permet de comprendre cette logique narrative, force est de constater que le couple antagoniste enfance/mort habite l’œuvre de Guibert depuis le début de sa pratique d’écriture, avant même l’apparition du sida dans les corps et dans l’imaginaire. Avant de publier son texte La mort propagande en 1977, dans lequel il imagine des scénarios de sa propre mort, Guibert a tenté de faire publier plusieurs livres pour enfants qu’aucun éditeur n’a retenus ((L’anecdote provient de Michel Foucault (1977 : 107).)).
Se déploie en somme chez Guibert un désir d’enfant que son œuvre éclaire et dont l’érotisation n’est qu’un élément ((Le deuil et la filiation étant les deux autres scènes identifiées dans le mémoire, où s’actualise la figure de l’enfance.)). L’expression « désir d’enfant » est en elle-même polysémique. En plus d’être un désir exprimé à l’endroit de l’enfant, un « désir d’enfant » peut aussi être un désir que ressent un enfant, son désir. On peut également comprendre « désir d’enfant » comme étant l’expression du désir d’avoir un enfant, d’enfanter. Avoir, toucher, prendre, manger, dominer l’enfant sont toutes des facettes exprimées par le sujet de l’écriture, chez Guibert, qui comportent aussi – et surtout – leur envers : être l’enfant, être mangé, dominé, regardé, battu par lui. Pour donner toute sa place à l’énonciation de ce désir, il m’a semblé qu’il ne fallait pas, dans le mémoire, appliquer de filtre moral ou éthique en surplomb.
[heading style= »subheader »]Investir la marge[/heading]Sur cet enjeu sensible qu’est l’érotisation de l’enfant, il semble que l’on soit tenté, avant toute chose, d’identifier le degré de véracité, la part biographique du texte. Bref, de ne s’intéresser qu’au caractère référentiel de la fiction littéraire, là où l’on admet généralement d’emblée la scission entre le réel et l’écriture. Il m’apparaît en ce sens que s’intéresser à l’énonciation d’un désir d’enfant dans un cadre qui n’est ni légal, médical ou psychiatrique consiste à investir une marge, à occuper un lieu contourné de la recherche.
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[heading style= »subheader »]Quelle(s) fonction ou quel(s) rôle(s) peut-on attribuer à l’artiste qui investit la/les marge/s et qui décide d’en faire son lieu?[/heading]Étudier un texte consiste pour moi à me pencher sur sa syntaxe, sa texture; voir comment un désir opère à même la trame énonciative. Du moment qu’un artiste cherche volontairement à occuper une posture marginale, à en faire « son lieu », il me semble que mon approche – la psychanalyse – s’avère moins pertinente. Dans le cas de Guibert, l’énonciation du désir d’enfant apparaît comme une nécessité; Guibert ne cherche pas à provoquer ou choquer. Jouir de l’enfant, s’imagine-t-il, pourrait le sauver d’un mal indéfinissable. Il impose à son texte cette idée obsédante sans d’autres égards, comme en témoigne ce passage de Voyage avec deux enfants :
[J]e me force à jouir en pensant à un enfant. Mais comme une encre molle qui accroche mal le sable, qui le frôle seulement et glisse en emportant le bateau ailleurs, dans son vent (mon propre vent de jouissance est une image adulte), ma divagation ne cesse de dessiller l’enfant que je m’impose, elle m’éloigne de lui au lieu de m’en approcher, elle me le vole, et me ramène au pied de cette architecture d’obscénité, grouillante de corps mûrs, que j’ai patiemment élaborée depuis que je manie le plaisir. Revenir à l’enfant malgré les vents contraires, lutter dans le courant inverse, laisser tomber les corps familiers comme des fruits pourris, leur substituer dans les mêmes postures des corps chétifs, est un excellent dressage. […] [J]e suis repris d’une sensation première de vomissement, et je crache enfin une tache trop longtemps contenue, presque verte, maladroite, idéalement enfantine (1982 : 18-19).
Pourquoi, à quel moment et comment l’enfance apparaît-t-elle au sujet de l’écriture comme salvatrice? C’est la question que j’ai envie de poser au texte. La marge n’est pas un lieu que Guibert cherche délibérément à occuper, et c’est ce qui fait à mon avis l’authenticité de son écriture. Elle répond à d’autres impératifs que j’essaie, comme chercheur, de déceler. Cela dit, je remarque que là où Guibert cherche à provoquer dans son rapport au réel, lorsqu’il dévoile de plein gré la vie et les secrets de ses amis connus en faisant d’eux des personnages (Michel Foucault, Isabelle Adjani, etc.), on s’intéresse davantage à son écriture; À l’ami qui ne m’a pas sauvé la vie étant son texte ayant obtenu le succès populaire le plus important et l’intérêt le plus marqué chez les universitaires. C’est donc que là où Guibert apparaissait comme marginal – dans sa démarche autofictionnelle et de par son impudeur relativement inédite à l’époque – sa pratique était institutionnellement légitimée, démarginalisée.
[heading style= »subheader »]Ces recherches participent-elles, d’une manière ou d’une autre, à dépasser les paramètres disciplinaires et la structure institutionnelle de l’université, notamment par le fait de relayer, directement ou non, la parole des marginaux et marginales?[/heading]
Je remarque que les textes sur lesquels je me suis penché dans cette recherche ne sont que très rarement réédités. Ils se trouvent, d’une certaine manière, rejetés par l’institution littéraire et les études qui portent sur eux deviennent le seul moyen de relayer la parole qu’ils mettent en acte. Cette réticence à republier ces textes s’explique, à mon avis, par les mutations que subit l’enfance dans l’imaginaire contemporain. Le désir d’enfant, même s’il est violemment et collectivement condamné lorsqu’il se présente dans ses formes les plus évidentes, n’a jamais été autant célébré dans ses formes symboliques, détournées ((L’analyse de Régnier Pirard à ce sujet est éclairante : « Défenestré du fantasme tel que peut l’élaborer une structure névrotique, le voilà [l’enfant] tombé au rang d’objet partiel à portée de main, non plus cause de désir mais impératif de jouissance. L’exploitation sexuelle, commerciale, marchandisée de l’enfant témoigne de ce nouveau statut. Enfants mannequins dans la mode, vedettes dans le show-biz où la compétition sportive, voire tout bonnement exploités comme main-d’œuvre quasi gratuite, ou même violés puis consommés dans des réseaux pédophiles, volés et dépecés pour fournir des pièces détachées dans les trafics d’organes bientôt peut-être issus du clonage et mis en culture pour des usages très incertains » (2010 : 45).)). La figure de l’enfant comme objet de violence fascine autant qu’auparavant, mais c’est par la lecture de faits divers – qui en est la mise en récit la plus consommée – que semble liquidée cette fascination qui occupe l’esprit humain de tout temps, en témoigne la Bible et la tragédie grecque.
Sur le plan littéraire, l’érotisation de l’enfant apparaît comme un enjeu difficile à dénouer, extrêmement polarisant, où chaque parole prononcée est rapidement classée du côté de la condamnation ou de la légitimation. Il y a pour moi entre ces deux pôles un espace où la pensée est possible, où l’on peut chercher à comprendre, mettre en contexte, éclairer : l’institution universitaire. En ce sens, ma démarche ne cherche pas à dépasser la structure institutionnelle de l’université, mais à occuper son espace, qui est à certains égards toujours déjà en marge.
[heading style= »subheader »]Bibliographie[/heading]
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