Note : Ce texte est gagnant du volet « poésie » du concours de création littéraire de l’Ambassade de France au Canada, ouvert aux étudiants des trois cycles du Département de français de l’Université d’Ottawa.
La première heure
Gémissement amorti par les doigts,
Bruissement d’ailes.
Le bruit sec de la pendule annonçait une trêve.
C’était beau. J’avais toujours voulu t’entendre sans mots.
Blanc comme les baisers vanillés gravés dans ma barbe, comme les draps qui nous ont longtemps emballés aux saisons de février.
Un lendemain de croissants sous un chêne, d’une craie qui bafouille ses chiffres sur du bitume terni. Ballons de la cinquième case, saut d’un corps dense.
Pour toi, aux espoirs vidés.
Des oscillations de la balançoire, ta gorge pianotait des cris de détresse.
Petite fille choyée!
Étreinte d’un sang séché sous ton nez, ce menton méconnaissable.
Petite fille gâtée!
Vert comme les tiges que tu as souvent ramassées pour plaire, comme la petite sirène qui périt en mer.
Le troisième jour, pour éviter d’être comme toi,
J’ai composé une mélodie au violon
J’ai composé des fables sur ton pied
J’ai composé un bouquet d’hémérocalles.
Un soupçon de mucus sur ton regard flétri, une méfiance éloquente.
Violet comme la bosse qui orne ton cou, comme la robe disloquée qui tapisse ton ventre.
Ce soir, le parfum de mes tissus nous fait frémir.
Petite fille fétide
Petite fille putride
Va-t’en avant que la noirceur s’installe.